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Évaluation "pluraliste" en région et responsabilité politique, quelques leçons d'une comparaison.

Par adminDernière modification 20/06/2006 11:23

Communication d'Éric Verdier

Éric Verdier LEST, (UMR 6123), Université d'Aix en Provence

Résumé

Selon l'idéal démocratique, " la responsabilité est le passif qui vient équilibrer l'actif de tout pouvoir " qui lui-même " a toujours une double dimension, proportionnelle l'une à l'autre : le droit d'agir, le devoir d'en rendre compte " (Beaud, Blanquer, 1999). Cette obligation constitutionnelle de rendre des comptes publiquement est donc au fondement de l'exercice démocratique des responsabilités du pouvoir exécutif. En effet, la transparence de l'exercice du pouvoir n'est-il pas le moyen efficace de le mettre en question et le préalable pour, éventuellement, lui retirer le titre lui permettent de l'exercer légitimement (Baranger, 2003) ?

L'accroissement des compétences des collectivités territoriales au fil des étapes de la décentralisation transfère progressivement cette obligation démocratique aux " gouvernements locaux ", tels que les exécutifs régionaux.

Alors que la complexité croissante de l'action publique rend beaucoup plus ardue l'analyse et a fortiori l'imputabilité des effets d'une action publique, l'évaluation peut-elle être la forme cognitive et institutionnelle de cette exigence d'" accountability ", sans laquelle il n'est pas de pouvoir qui ne puisse être contrôlé par le souverain ? Ou, dit autrement, dans le cours d'une décentralisation qui entremêle les responsabilités de pouvoirs publics de différents niveaux avec celle d'acteurs privés (entreprises et partenaires sociaux), l'évaluation des politiques publiques est-elle un soutien pertinent à l'exercice de la responsabilité politique ?

Cette communication ne prétend pas apporter des réponses complètes et catégoriques à des questions aussi importantes pour l'action publique. Il s'agit simplement d'en éclairer certains aspects. Assiste-t-on au renforcement réciproque, d'un côté de la responsabilité politique des " gouvernants " et de l'autre, des responsabilités techniques des " experts évaluateurs ". Dit en d'autres termes, pratiques politiques et pratiques expertes font-elles converger leurs dynamiques respectives ou, au contraire, se nuisent-elles au point de rendre contradictoires la quête de la légitimité politique et la recherche d'une meilleure régulation de l'action publique ?

On s'appuie ici sur la mise en perspective de trois types de travaux évaluatifs auxquels l'auteur de ces lignes a contribué directement. Les deux premières études, menées l'une en Rhône Alpes, l'autre en Provence Alpes Côte d'Azur (PACA), ont comme points communs d'avoir concerné des contrats de Plan Etat-Région (CPER) durant les années 90 sur le thème de la formation professionnelle et d'avoir été mises en œuvre sous l'égide d'une présidence de Région de même appartenance partisane (Démocratie Libérale). Le 3 ème type relève de contributions aux dispositifs d'évaluation des politiques régionales de formation des jeunes déployés dans le cadre de l'article 53 de la loi quinquennale sur l'emploi, le travail et la formation professionnelle de 1993.

La comparabilité des ces expériences est renforcée par la similitude des démarches d'évaluation ; elles relèvent toutes d'une " évaluation pluraliste " (Lascoumes, Setbon, 1996), paradigme évaluatif désormais largement prédominant dans le contexte français.

Plus qu'aux contenus, on s'intéresse ici aux processus socio-techniques d'évaluation et aux conditions politiques qui président à leur déroulement.

Contractualisation et décentralisation se conjuguent pour engendrer un besoin croissant d'informations et de coordination, suscitant lui-même une demande d'évaluation (Benhayoun, Lazzeri, 1998). Dans ce contexte, au moins rhétoriquement, l'évaluation prend sa place dans la conduite de l'action publique, en tant que facteur de " bonne gouvernance " (Baslé, 2000).

Dans ce nouveau contexte institutionnel et normatif, les interrogations sur le sens et la portée de l'évaluation de l'action publique, dont cet article est porteur, ne peuvent faire l'économie d'une analyse de la dynamique endogène de chacun des dispositifs d'évaluation mis sur pied. A l'interface des configurations institutionnelles héritées des cadres nationaux et des logiques d'action propres à chacun des dispositifs, trois dimensions vont structurer cette comparaison des modes de construction de la responsabilité des acteurs politiques et techniques dans le cours de la démarche évaluative : la légitimité politique de l'évaluation ; la procédure d'évaluation comme processus de responsabilisation et la publicisation des résultats.

À l'épreuve de cette nouvelle phase de la décentralisation, l'évaluation " pluraliste " présente l'avantage d'associer des configurations d'acteurs politiques, sociaux et experts à la production des savoirs pertinents. Mais de cette complexité institutionnelle, il résulte que l'imputation d'une responsabilité est très délicate.

Dans deux des trois cas étudiés, l'évaluation pluraliste témoigne d'une incapacité, au moins relative, à soutenir la délibération publique sur la pertinence de l'action publique dans le domaine étudié, compte tenu des conditions de validation et de diffusion des informations et des connaissances qu'elle produit. Dès lors, elle peine à identifier des objectifs précis qui puissent servir de référents à l'évaluation et à engendrer des retombées directes pour la qualité et les bénéfices individuels et collectifs des formations. Ceci dit, cette comparaison montre qu'il n'y a pas de fatalité à l'irresponsabilité politique de l'action publique multi-acteurs aux compétences imbriquées.

En termes procéduraux, la démarche doit strictement découpler les instances politiques, sociales (les intérêts organisés) et scientifiques, notamment pour asseoir la légitimité de cette dernière composante et organiser la confrontation et non la confusion des registres. Dans le cas contraire, l'évaluation des politiques publiques peut facilement devenir un instrument de manipulation ou se muer en " évaluation politique ", c'est à dire en jugement discrétionnaire.

Mais aussi sophistiquée soit-elle, la procédure ne peut échapper aux effets de contexte nationaux et régionaux. A ce propos, on peut avancer que l'évaluation reste " mal arrimée " en règle générale, aux activités de gouvernement et peu intégrée à la formulation et à la mise en œuvre de l'action publique (au moins dans le domaine de la formation).

L'un des paradoxes tient au fait que le recours au contrat comme technique de coordination des acteurs publics a plutôt renforcer l'opacité de leurs actions que favoriser l'explicitation des enjeux (Verdier, Vion, 2005). Néanmoins, ce risque peut être conjuré si des projets d'initiative régionale, structurants et identifiables comme tels, sont assumés politiquement et font l'objet d'évaluations dont les résultats, moyennant débat dans l'espace public, sont converties en règles procédurales et substantielles partagées. Elles peuvent alors nourrir des méta-évaluations de nature à établir une sorte de jurisprudence de la " bonne évaluation contextualisée ".

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