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L'éducation dans les sociétés d'après l'État providence

Par adminDernière modification 20/06/2006 00:20

Communication de Sally Tomlinson pour la séance plénière de lundi 15 mai "Tous et les meilleurs : justice en éducation et modèle de société dans les pays développés"

Les sociétés postérieures à l'Etat providence connaissent une fragmentation des programmes d'assistance sociale à travers la mise en place de principes de marché.  La réforme des services sociaux dans des pays suffisamment riches pour avoir proposé une protection sociale aux salariés, à ceux en invalidité, la gratuité de l'éducation et de la formation est en marche depuis les années 70. Selon les responsables politiques, les coûts liés à la protection sociale sont trop élevés et non viables dans des sociétés en concurrence au sein d'une économie de marché mondialisée. La privatisation des services publics s'avère alors nécessaire pour préparer l'ouverture aux marchés et accroître le choix. Les sociétés se considérant elles-mêmes comme des Etats Providence ont été transformées en Etats de marché dans lesquelles l'éducation est devenue un secteur concurrentiel en partie privatisé.

En Grande-Bretagne, l'éducation a été considérée comme un des trois piliers de l'Etat providence dès 1945 (avec la Santé et la Sécurité Sociale). La politique éducative a été fondée sur un consensus social démocratique selon lequel les gouvernements doivent réguler et financer le système éducatif pour parvenir à la justice sociale et assurer l'égalité des chances. Après 1979, une restructuration radicale des services publics au Royaume-Uni s'est mise en place. Les réformes qui visaient à encourager la concurrence et la privatisation des services à travers une rhétorique du « choix » et de la « diversité » ont été entreprises par les gouvernements conservateurs de Margaret Thatcher et John Major et ont été poursuivies par les gouvernements travaillistes de Tony Blair. L'introduction de la concurrence, le droit donné à tous de s'épanouir sur le plan personnel et professionnel et une moindre importance accordée à la redistribution, à l'équité et à la justice sociale ont augmenté les inégalités sociales et économiques de façon considérable. Malgré de nombreux discours et des financements supplémentaires pour les élèves défavorisés, le système éducatif continue de créer et recréer des inégalités (voir Pierre Bourdieu et ses collègues pour les meilleures analyses au plan théorique). Au cours des dix-huit dernières années, le système éducatif a été réformé en tous points. La croyance selon laquelle les moyens accordés au système éducatif seraient mieux partagés nous ramène avant les années 40 où l'on pensait qu'une bonne éducation devait se gagner par la compétition et ne constituait pas un droit démocratique. L'éducation est passée du statut de pilier de l'Etat providence au rôle de soutien à l'économie de marché mondialisée et elle sert d'instrument pour développer l'Etat de marché.

L'éducation de 1945 à 1979

L'après guerre au Royaume-Uni a marqué le début de l'instruction de masse des élèves à des niveaux autrefois réservés aux élites. Avant la Loi de 1944, presque 90% des élèves quittaient l'école à 14 ans et seulement 5% d'entre eux accédaient à l'enseignement supérieur. Bien que le parti travailliste plaidait pour la création de comprehensive schools (établissements polyvalents d'enseignement secondaire conçus pour accueillir tous les élèves sans distinction et leur offrir des chances égales), le gouvernement travailliste préférait un système tripartite : 20% de grammar schools (lycées sélectifs avec examen d'entrée), 6% d'écoles techniques et le reste en secondary modern schools (établissements secondaires d'enseignement général et technique). La scolarité est obligatoire jusqu'à 15 ans. Les travaillistes ont toujours cru en la méritocratie 1, en supposant que les évaluations pourraient distinguer les plus « capables » et les orienter vers l'enseignement supérieur et diriger les autres vers une formation professionnelle. Malgré les chances offertes à quelques enfants de milieu populaire, cette nouvelle structure reflétait parfaitement la structure économique et sociale et de fait, réservait l'enseignement supérieur puis les postes de direction et l'accès aux professions libérales à ceux qui avaient soi-disant plus de capacités. Sans surprise, ceux qui avaient le plus de capacités étaient issus des classes supérieures. Les secondary modern schools préparaient surtout les enfants de milieu populaire à un emploi manuel qualifié sur le marché du travail. Les gens aisés et influents continuaient à suivre un enseignement privé. Bien que la droite continuait à plaider pour un système éducatif sélectif, à partir des années 60 tous les partis ont reconnu le besoin d'étendre le système éducatif. Alors les comprehensive schools se sont lentement développées tout en maintenant l'orientation des élèves en différentes filières. L'accroissement progressif d'un système scolaire égalitaire a connu un revers dans les années 70 suite à la récession et la montée du chômage des jeunes. Les hommes politiques de tous les partis ont alors accusé l'école de mal préparer les jeunes au marché du travail. L'âge de la scolarité a toutefois été porté à 16 ans en 1973 et dès 1980, environ 60 % des élèves allaient dans des comprehensive schools .

L'éducation de 1980 à 1997

A peine l'éducation pour tous fut-elle mise en vigueur qu'on lui reprocha de manquer à sa promesse égalitaire et de ne pas former une main d'œuvre adaptée aux temps modernes. Le gouvernement de Margaret Thatcher semblait proposer une approche idéologique plus cohérente. Elle était centrée autour des notions d'économie de marché déréglementée, de choix, de concurrence, de « meilleures écoles » (DES, 1985) ainsi que du respect de la tradition et de la hiérarchie. Alors qu'une seule Loi (1944) avait régi le système éducatif pendant 25 ans, le gouvernement Thatcher a voté plus de 30 Lois en 17 ans. Les local Education Authorities ont progressivement perdu nombre de leurs prérogatives. Par ailleurs, la façon de gérer les structures pédagogiques, le financement, les ressources, la pédagogie, l'évaluation, les modes d'inspection, l'autonomie des enseignants, le secteur périscolaire, l'enseignement supérieur, la formation professionnelle ont tous fait l'objet de critiques et de nouvelles lois. Diverses stratégies pour limiter l'offre éducative et « sortir » des comprehensive schools ont vu le jour (e.g. mise en place du programme assisted places où l'Etat payait une partie des frais de scolarité pour la scolarisation d'enfants défavorisés dans le privé).

Les comprehensive schools continuèrent néanmoins à se développer. En 1989, 87% des élèves étaient scolarisés dans ce type d'établissements, malgré une forte sélection à l'entrée. A partir de 1986, tous les élèves devaient passer le GCSE ( General Certificate of Secondary Education ) à 16 ans. Le niveau scolaire des élèves, notamment celui des filles et des minorités ethniques, commençait à progresser. Dans le même temps, toute une série de centres de formation pour les jeunes en difficultés a fleuri. Une Loi de 1980 autorisait les parents à « faire des vœux » quant au futur établissement de leur enfant. Cependant, c'est seulement en 1988 qu'une Loi a réellement donné plus de droits aux parents à ce sujet. Le financement a été délégué aux établissements qui avaient par ailleurs compétence pour sélectionner les « meilleurs » élèves. La publication des résultats aux examens, palmarès comparables aux classements de football, à partir de 1992 ne faisait que renforcer cette concurrence. L'objectif était de fermer les établissements qui affichaient de faibles taux de réussite. Bien que l'occasion fut donnée à quelques parents défavorisés d'éviter les « mauvais » établissements, le fait de pouvoir choisir l'école de ses enfants fit que la classe moyenne blanche quitta les établissements urbains, ne faisant ainsi qu'accroître le fossé avec les écoles défavorisées. Les écoles qui acceptaient les élèves issus de milieu populaire, de minorités ethniques, les primo arrivants et les élèves à besoins éducatifs spécifiques portaient de plus en plus l'étiquette d'écoles « faibles » (appelées « écoles nécessitant des améliorations significatives » à partire de 1985) et faisaient l'objet de critiques publiques par le corps d'inspection OFSTED désormais privatisé. La Loi de 1988 introduisit des programmes scolaires nationaux qui, bien que modifiée au fil des ans, demeure largement anglocentrique. Le gouvernement mit la main sur la formation des enseignants à travers la création de la Teacher Training Agency (Agence de Formation des Enseignants) mais ouvrit l'enseignement supérieur par la mise en place des Polytechnics (équivalent des I.U.T. en France) et la transformation d'établissements d'enseignement supérieur en universités. Une nouvelle hiérarchie s'établit parmi les universités ; Oxford et Cambridge toujours au sommet et les « nouvelles » universités plus bas dans le classement. La Loi de 1988 autorisa également l'apport de fonds privés et des responsables issus du milieu de l'entreprise furent mandatés pour créer des City Technology Colleges (établissements d'enseignement technologique). Les chefs d'entreprise n'étaient guère enthousiastes. Seulement 15 établissements furent créés. En 1993, un partenariat écoles spécialisées-entreprises a été présenté comme une autre façon d'attirer des fonds privés. Malgré l'adoption de programmes scolaires nationaux, les établissements secondaires pouvaient se spécialiser dans une matière ou un domaine (la technologie, l'art, le sport, l'informatique, les mathématiques, la musique, etc.) à condition de lever 50000 livres de fonds privés. Au milieu des années 1990, les politiques du parti conservateur et du nouveau parti travailliste convergeaient : les initiatives se multipliaient pour maintenir la sélection à travers les grammar schools (établissements sélectifs avec examen d'entrée) restantes et les écoles spécialisées et pour accroître le financement privé du système éducatif. Des tentatives ont également été menées pour s'occuper des élèves issus de milieu populaire qui étaient de plus en plus nombreux à quitter l'école sans qualifications et se retrouvaient au chômage à une époque où les métiers manuels dans l'industrie se faisaient rares.

L'éducation de 1997 à 2006

A partir de 1997, le nouveau parti travailliste a poursuivi la politique éducative des conservateurs à travers une avalanche de lois, d'initiatives, de contrôles et la centralisation des décisions. Les notions de choix, de concurrence et de privatisation ont été entérinées. Le système éducatif se développait en tant que marchandise répondant soi-disant à la demande des consommateurs et la concurrence se déplaçait en amont, dès le primaire où les places dans les « bonnes » écoles étaient chères. Le discours portait sur « l'élévation des niveaux scolaires » (les résultats des élèves aux évaluations continuaient d'augmenter : en 2005, 55% d'entre eux atteignaient le niveau d'exigence requis au GCSE malgré des écarts selon la classe sociale, le sexe et l'origine ethnique). L'engagement de mettre un terme à la sélection s'essoufflait ; au contraire, de nouvelles formes de sélection pointaient sous la notion de « diversité scolaire ». Le gouvernement exerçait toujours une place centrale, contrôlait les programmes nationaux, l'évaluation des élèves, la formation des enseignants, restreignait les prérogatives des Local Education Authorities 2et insistait sur la nécessité de gérer toutes les institutions scolaires comme une entreprise et d'accroître le financement et l'influence du secteur privé.

La part de l'argent public dans le financement des établissements, l'enseignement professionnel, l'apprentissage tout au long de la vie et les salaires des enseignants a néanmoins été augmentée même si la construction ou le remplacement de nouvelles écoles se devait se faire désormais sur fonds privés. En 2006 les dépenses publiques d'éducation allaient atteindre la moyenne des pays membres de l'OCDE. Le gouvernement s'est clairement engagé sur la voie de la justice sociale et a pris plusieurs initiatives en faveur des zones urbaines défavorisées. Citons notamment la création en 1997 des Education Action Areas (zones d'action éducative) reprise en 1999 sous la forme des programmes Excellence in Cities qui promettaient un effort supplémentaire pour pousser les « talents » et aider les élèves « doués » à travers la mise en place des Learning Support Units (groupes de soutien à l'apprentissage) et des Learning Mentors (tuteurs) pour les élèves défavorisés en difficulté. Le programme Sure Start (travail en commun d'enseignants, de responsables sanitaires et de travailleurs sociaux) pour les 0-3 ans issus de milieu défavorisé a été considéré comme une réussite. Suite à la publication du rapport Every Child Matters , l'accent s'est porté sur les politiques d'aide à l'enfance couronnées par le Children Act voté en 2004. L'éducation à a citoyenneté est devenue obligatoire dès 2002.

La politique poursuivie par les travaillistes, notamment l'élargissement de l'offre dans le secondaire par la création d'écoles religieuses 3 a suscité la controverse. La diversité de l'offre se répartit ainsi : 164 grammar schools qui ont une incidence sur le recrutement de 500 comprehensive schools dans le même bassin de recrutement, des écoles privées hors contrat, des comprehensive schools qui à partir du 1 er septembre 1999 s'appelaient foundation ou community schools (écoles publiques en Angleterre et au Pays de Galles ; les foundation schools ont plus d'autonomie que les community schools dans la gestion de l'établissement et en matière de recrutement), voluntary aided schools (écoles à caractère religieux) et environ 2000 établissements spécialisés dans un ou deux domaines du programme et autorisés à sélectionner 10% des élèves selon leurs aptitudes, les derniers City Technology Colleges (établissements indépendants qui assurent un enseignement de spécialité - technologie, maths, sciences - avec un financement mixte public-privé) et, à partir de 2003, la montée en puissance des Academies , projet porté par le premier ministre et son conseiller Andrew Adonis. Dans l'esprit, les Academies devaient être des « écoles indépendantes semi-privées » disposant du statut d'association caritative et parrainées par des associations bénévoles, des églises ou des entreprises et étaient censées remplacer les écoles en échec. En 2006, 17 academies étaient ouvertes ou devaient ouvrir avec un objectif de 200 d'ici 2010. Les fonds provenaient des banques, de magnats des transports, de clubs de football, d'agences de sport, de proviseurs d'écoles privées, de groupes religieux dont un créationniste qui avait fait fortune dans la vente de voitures d'occasion. Les Lois sur l'Education de 2002 et 2005 rognaient davantage les pouvoirs des Local Education Authorities (à partir de 2002, celles qui n'avaient pas les résultats escomptés pouvaient être reprises en main par des entreprises privées. Bill Gates s'est montré immédiatement intéressé. L'idée de voir les grandes entreprises mondiales à la tête des établissements publics en Angleterre va peut-être à l'encontre de la conception de l'Etat providence mais pourrait bien correspondre à l'Etat de Marché décrit ci-dessous.

Un Etat de Marché

En Grande-Bretagne, le gouvernement travailliste a inventé le concept de « troisième voie » (Giddens, 1998) – tentative de panacher démocratie et justice sociale d'un côté et économie de marché de l'autre. L'objectif affiché était d'expliquer à la population les raisons de la baisse de l'assistance publique, l'incursion du monde de l'entreprise et l'idée de bénéfices dans les services publics et le gain que les citoyens pourraient en attendre. Le discours sur la « troisième voie » n'a jamais trouvé beaucoup d'écho dans la mesure où les personnes étaient plus susceptibles de se voir contraintes à un retour vers le capitalisme primitif où le profit passe avant la personne et de nourrir « l'armée mondiale de réserve de main d'œuvre » (Glyn, 2006), avec en arrière-plan « le spectre de l'inutilité » (Sennett 2006) qui menace les plus âgés ou les moins formés.

Philip Bobbit, à travers la description qu'il fait de L'Etat de marché, apporte une explication plus plausible à la situation actuelle en Grande-Bretagne. Il a dressé la typologie historique des différentes formes d'Etats et en a conclu que l'Etat Nation et l'Etat de Marché représentent les deux formes les plus récentes. L'Etat Nation se charge d'assurer « la gratuité et l'accès de tous à l'école publique, le droit de vote universel ainsi que l'application d'une politique de sécurité sociale et s'engage à garantir le bien-être de la Nation » (ibid., 21). A ses yeux, l'état nation est un frein pour les salariés les plus productifs et crée un état de dépendance. Désormais les gouvernements ne peuvent plus pourvoir à l'amélioration du bien-être de tous les citoyens, d'où une réduction permanente de l'Etat providence. L'Etat de Marché promet lui de développer au maximum les chances en rendant les gouvernements plus réceptifs aux attentes des marchés mondiaux. Il implique des déréglementations, des privatisations et l'externalisation des services. Les jeunes doivent être encore plus sensibles au crédo de la concurrence et de la méritocratie qu'aujourd'hui car le mérite de chacun sera évalué et quantifié sans pitié. Il s'agit d'encourager le dynamisme de la société par la concurrence. Selon Bobbit, l'Etat de Marché accorde peu de place à la moralité, à la justice sociale, à l'aide mutuelle et à la promotion des valeurs civiques parmi des citoyens liés par une idée du bien commun et le partage des institutions sociales.

Le Capital Humain dans les Sociétés postérieures à l'Etat Providence

La société de marché post Etat providence se caractérise par une dépersonnalisation des individus et leur transformation en consommateurs, ressources et capital humain. L'importance accordée à la création d'une main d'œuvre adaptable, flexible et la réduction des prestations sociales pour les personnes dans l'incapacité de travailler ou leur versement à la discrétion de l'autorité compétente ont porté l'attention sur les moyens de préparer, d'exiger voire de contraindre si nécessaire les personnes, vues comme capital humain, à travailler. Les gouvernements de l'ère postindustrielle ont fait de l'éthique du travail et de la concurrence l'alpha et l'oméga de leurs politiques. Dans l'Etat de Marché, le capital humain doit s'adapter à n'importe quelle orientation que le gouvernement juge nécessaire de suivre pour maintenir la compétitivité économique. La théorie du capital humain avance que l'amélioration des compétences et des capacités aboutit à une nouvelle façon de travailler, plus productive. En Angleterre, on suppose que les investissements en éducation et en formation et la contrainte aideront le pays à rivaliser dans une économie mondialisée. Dans un document publié par le DfES ( Department for Education and skills ), équivalent du ministère de l'Education nationale, « investir dans l'apprentissage au 21 ème siècle, c'est comme investir dans des machines lors de la première révolution industrielle (DfES 1996, 15)». Le gouvernement travailliste n'a cessé de mettre l'accent sur le devoir des individus de se former, se recycler, s'engager sur la voie de l'apprentissage tout au long de la vie et a pressé les institutions scolaires de s'adapter aux exigences des entreprises. Dans une lettre récente du secrétaire d'Etat à l'éducation adressée au Conseil du financement de l'enseignement supérieur (qui finance toutes les universités), il est stipulé qu'une « stratégie de croissance sera la garantie que l'enseignement supérieur remplit pleinement le cœur de sa mission, à savoir développer les compétences dont le marché du travail a besoin ». On demande de plus en plus aux universités de chercher des financements privés pour assurer croissance et stabilité, d'où l'influence des entreprises et de leurs besoins actuels sur le contenu enseigné. Cependant rares ont été les discussions sur les relations entre l'éducation et les économies au niveau national ou international. Du point de vue du capital humain, les facteurs qui échappent au contrôle des gouvernements nationaux rendent l'investissement personnel très risqué. En effet, au sein d'une économie mondialisée, le travail, même pour les plus qualifiés, va là où le capital peut faire des bénéfices. Il revient alors aux gouvernements de tout mettre en œuvre pour attirer et garder ce capital. Mais se lancer dans une période de recyclage et d'apprentissage tout au long de la vie ne se traduira pas forcément par un salaire correct. Les explications des politiques éducatives actuelles en Angleterre doivent tenir compte de questions plus larges liées à la gestion des changements socioéconomiques dans une économie mondialisée. Toute modification profonde quant à la structure, au contenu, à la façon de piloter les systèmes éducatifs des pays développés se heurte à des contraintes qui dépassent le cadre national. Pour le moment il est peut-être trop idéologique d'attendre de l'éducation qu'elle aide les personnes à comprendre les changements au niveau mondial, qu'elle lutte contre le retour de la xénophobie et du nationalisme, qu'elle recrée l'idée d'un bien commun et qu'elle permette de dépasser notre asservissement aux marchés. Mais ce serait peut-être en définitive une bonne idée.

References

Bobbitt P. 2002 The Shield of Achilles. London and New York. Allen Lane

DfES 1999 Excellence in Cities London the Stationary office

DfES 1996 Learning to compete. Education and Training for 14-19 year olds

London HMSO.

DES 1885. Better Schools London. HMSO

Giddens A 1998 The Third Way Cambridge. Polity Press

Glyn A 2006 Capitalism Unleashed London.

Sennett R 2006 The Culture of the New Capitalism Newhaven. Yale University Press

Tomlinson S 2005 Education in a Post-Welfare Society (2 nd ed) Berkshire. Open University Press/McGraw-Hill

1 C'est au 19 ème siècle que les idées de « la carrière ouverte aux talents » se sont développées et ont abouti à la réforme des administrations d'Etat. Le concept de méritocratie et les effets présumés sur la hiérarchie au sein des systèmes éducatifs ont fait l'objet de nombreuses critiques.

2 D'ici 2006 toutes les Local Education Authorities auront cédé la place à des Local Authorities

3 Environ 23% des élèves sont scolarisés dans des établissements religieux [de confession protestante et catholique mais aussi juive (22), musulmane (5), hindou, sikhe et grecque orthodoxe] financés par l'Etat.

Education et sociétés
Numéro 21
Former des élites dans un monde incertain
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