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Education et Formation tout au long de la vie (ETLV) : de la rhétorique européenne aux tâtonnements des modèles nationaux

Par adminDernière modification 19/06/2006 23:26

Communication d'Éric Verdier pour la séance plénière du mardi 16 mai "La prise en compte des diversités et ses ambiguïtées

Education & Politique et A.I.S.L.F.
Eric Verdier (LEST, UMR6123)
eric.verdier@univmed.fr

 

Version provisoire

On partira de l'hypothèse selon laquelle l'émergence et la fortune politique de « l'éducation et de la formation tout au long de le vie » (traduction désormais officielle de Life long learning) sont liées, -à des degrés divers et par l'entremise de diagnostics plus ou moins formalisés et partagés - aux désillusions engendrées par les politiques classiques de formation ? :

. Des politiques de réinsertion des chômeurs peu efficaces ou même stigmatisantes pour les « bénéficiaires »

. Une 2 ème chance peu opérante, en particulier pour les moins formés initialement et/ou les moins qualifiés, qui n'accèdent que difficilement aux ressources en cours de vie active (auto-sélection, faible appétence …)

. Des formations continues développées par les firmes qui restent sélectives et très inégalitaires et se sur-ajoutent aux segmentations produites par la gestion des ressources humaines

. Une formation professionnelle initiale dont le pertinence est mise en question dès lors qu'elle implique des orientations précoces, créant ainsi des différenciations sociales fortes vis à vis de l'accès à la formation générale, qui serait plus à même de préserver l'autonomie des personnes.

Pour la stratégie européenne de l'emploi (SAE), les systèmes nationaux d'éducation et de formation doivent s'adapter, tant aux besoins de la « société de la connaissance », qu'à la nécessité de relever le niveau d'emploi et d'en améliorer la qualité. L'EFTLV serait un moyen de « moderniser le modèle social européen » et de créer un « Etat social actif. » Le discours se développe dans un registre d'autant plus normatif qu'il est peu outillé par des règles et autres équipements institutionnels et techniques.

Cette orientation « mobilisatrice », dès le départ liée à la « stratégie de Lisbonne », est censée articuler deux exigences :

- « Responsabiliser : démarche qui consiste à octroyer aux individus le pouvoir de prendre des initiatives responsables en vue d'orienter leur vie et celle de leur communauté (ou société) dans les domaines économique, social et politique »

- Promouvoir une « égalité d'opportunités », les pouvoirs publics devant non pas fournir les éléments de sécurité et de succès mais permettre à tous de les obtenir.

Cette manière d'articuler efficacité et équité est assez proche, manifestement, d'un individualisme patrimonial à la Giddens. Néanmoins, les formulations employées conservent une ambiguïté suffisante pour laisser se développer d'autres référents qui conçoivent le développement de l'individualisation dans un cadre collectif dont l'élaboration sociale et politique est censée être un préalable : voir notamment les propositions des tenants des marchés transitionnels (Schmidt, Gazier) ou des droits de tirages sociaux (Supiot et son désormais célèbre rapport remis à la Commission). La répartition des risques de l'emploi et des risques sociaux entre individus et employeurs diffère évidemment profondément d'un cadre normatif à l'autre comme l'a bien montré Gautié.

Bref la souplesse de la politique européenne est telle qu'elle ouvre la voie à l'élaboration de politiques publiques assez différenciées. dans les faits c'est le plus souvent une hybridation des orientations évoquées ci-dessus qui vient façonner les dispositifs nationaux.

On esquissera ici une approche des modes d'appropriation aux niveaux national et local de cette (ces) rhétorique(s) européenne(s), en analysant les configurations d'acteurs impliqués, les règles et les ressources mobilisées dans les différents dispositifs de formation.

Pour cela on peut repartir dans un premier temps de la trilogie classique de G. Esping-Andersen sur les systèmes de protection sociale. On suggérera ainsi qu'un « Etat social corporatiste » peut donner lieu à deux « variantes » selon l'usage qui est fait de la formation tout au long de la vie en vue de couvrir les risques du marché du travail : l'une, centrée sur la grande entreprise et des marchés internes renouvelés, inscrira le recours à la formation continue dans une perspective managériale  pour la centrer sur l'adaptation des compétences à ses propres besoins avec l'inconvénient de peu préparer les salariés aux éventuelles mobilités externes ; la seconde privilégiera l'entretien et le perfectionnement de compétences conçus dans un cadre sectoriel avec des certifications reconnues et transférables, pouvant aller, comme le suggère l'exemple allemand, jusqu'à la constitution « d'académies professionnelles ». L'état « redistributif » ou « universaliste » qui trouve sa forme emblématique dans les pays scandinaves se prolongera dans le champ de la formation continue sous la forme de droits créances reconnus aux individus dans un cadre collectif (conventions collectives et/ou dispositifs publics), permettant à une deuxième chance de jouer véritablement, notamment en vue de l'accès à l'enseignement supérieur pour ceux qui en ont été détournés (Ericson). Enfin, « l'Etat libéral » organisera un marché de la formation et de l'éducation « tout au long de la vie » afin de permettre aux individus prévoyants d'entretenir leur employabilité et d'accroître leur capital humain valorisable sur le marché du travail.

Le cas français s'avère symptomatique de la pluralité des interprétations possibles d'autant qu'il laisse une place grandissante aux négociations de branche et aux projets des Régions. Ce retrait de l'intervention de l'Etat est justifié par l'affirmation répétée d'un « principe de double subsidiarité» : subsidiarité « horizontale » (ou sociale), par laquelle il revient en premier lieu aux acteurs sociaux de dégager par la négociation des solutions adaptées, dans leur champ de responsabilité ; et « subsidiarité verticale », en vertu de laquelle c'est aux acteurs publics de proximité, i.e les Régions, d'opérer la construction et le conduite de la politique, ce qui n'empêche pas de retours soudains de l'Etat surplombant, sous l'emprise de l'urgence politique.

Au travers des dispositifs qu'elle instaure, et spécialement le Droit Individuel à la Formation (DIF), la réforme de la formation continue engagée en 2003, par un accord interprofessionnel repris par la loi de mai 2004, est symptomatique d'une sensibilité croissante des acteurs sociaux et des pouvoirs publics aux thématiques de la sécurisation des trajectoires professionnelles et de la prévention individuelle face aux risques de l'emploi, compte tenu des défaillances des dispositifs de protection et de reclassement ; pour autant l'effectivité des nouveaux dispositifs, fondée sur l'idée que les apprentissages en cours de vie active sont une sorte de « principe de prévention » adapté au champ social, est encore très incertaine.

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