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La transmission sociétale de la citoyenneté. Une comparaison France — Angleterre.

por adminÚltima modificación 22/05/2007 14:20

Communication de Maroussia Raveaud pour le colloque "Déclin de l’institution ou nouveaux cadres moraux ? Sens critique, sens de la justice parmi les jeunes"


 

Une enquête comparative sur la conception qu'ont des élèves de quinze ans de l'équité à l'école dans six pays européens (Smith & Gorard 2006) fait ressortir des exigences partagées telles que le fait d'offrir une éducation de même qualité à tous, mais également des spécificités nationales dans les conceptions de l'équité. Ainsi, en matière de prise en compte souhaitée de la différence entre élèves, l'échantillon français se démarque de l'échantillon britannique par la minorité importante de jeunes qui estiment que l'équité exige plus d'attention aux moins doués. Être « doué » ou non est perçu comme un facteur déterminant dans la façon dont les élèves sont traités, facteur qui compte plus que le pays d'origine : d'après les enquêtés, les enseignants accordent un traitement préférentiel en distinguant au premier chef les plus travailleurs, suivis des plus doués, et en troisième position ceux originaires du pays par rapport à ceux d'origine étrangère (ces critères étaient les seuls proposés, l'origine socio-économique par exemple n'était pas intégrée dans l'enquête).

L'école apparaît donc en partie comme un univers autonome créant ses propres catégories (« travailleur », « doué ») dont l'incidence dépasse – même si elle peut les recouvrir partiellement – celle des catégories habituellement liées aux discriminations hors de l'univers scolaire (pays d'origine, classes sociales, genre, etc.). L'enquête soulève l'enjeu du lien entre équité et égalité, et celui de la prise en compte dans l'institution scolaire de la pluralité des identités. Elle conduit aussi à des interrogations d'ordre causal : si les élèves français souhaitent plus d'attention aux élèves en difficulté, la raison est-elle à chercher dans des caractéristiques institutionnelles (élitisme, faible pratique de la différenciation pédagogique, etc.) ou relève-t-elle des valeurs (solidarité, égalité, respect) ? Les opinions des élèves sont-elles le reflet d'expériences scolaires et sociétales différentes face à des aspirations qui seraient universelles, et/ou les principes de justice eux-mêmes diffèrent-ils ?

Nous proposons ici d'explorer la dimension sociétale de l'expérience scolaire et de la construction des principes de justice par le recours à la démarche ethnologique dans le cadre comparatif franco-anglais. Des observations menées dans des classes sont mobilisées autour de deux axes :

- comment se définit l'appartenance à l'école, à travers les possibilités institutionnelles de participation notamment ?

- dans quelle mesure l'institution scolaire constitue-t-elle un espace public, et comment celui-ci s'articule-t-il à la sphère intime et privée ?

Le sentiment d'appartenance à l'institution scolaire – même dans des systèmes permettant le choix d'établissement – reste le plus souvent à définir et à construire. Les responsabilités proposées aux élèves constituent une forme institutionnelle de participation qui renseigne sur l'économie symbolique de l'établissement du groupe-classe avec ses droits, ses devoirs, et des ressorts de l'appartenance fondés sur des modèles pluriels. À l'école primaire, les responsabilités déléguées aux enfants au sein de la classe constituent une étape clé dans la socialisation et la transmission d'une conception sociétale de la citoyenneté : le modèle du roulement dominant en France tend vers une participation construite comme droit et comme devoir, dissociée des caractéristiques individuelles ; en Angleterre, l'accès aux fonctions les plus prisées par le mérite et de témoignage de l'adhésion aux valeurs de l'école rend la participation conditionnelle et met l'accent sur les caractéristiques personnelles d'un être singulier. Dans l'enseignement secondaire, le mode de participation de prédilection en France est celui du « délégué de classe », par opposition à des formes plus variées faisant une large place aux initiatives bénévoles et associatives en Angleterre. Tandis que les écoles anglaises se construisent en référence au modèle de la community impliquant une prise en compte de l'individu inséré dans des groupes d'appartenance (sociale, culturelle, ethnique, religieuse, etc.) divers, les pratiques françaises se comprennent plutôt en référence à la Cité (Derouet 1992) fondée sur la conception rousseauiste du bien commun appréhendé à l'échelle de la société.

Les formes institutionnelles de participation font partie du processus de la transmission d'un modèle de citoyenneté, impliquant lui-même la construction d'une sphère publique qui se démarque des sphères privée et intime. La promotion du sentiment d'appartenance à l'école, abordée par le biais des possibilités institutionnelles de participation, repose sur des ressorts distincts de part et d'autre de la Manche, et correspond à deux idéaux-types de l'appartenance. Les pratiques scolaires françaises demeurent empreintes d'une démarcation forte des sphères publique et privée – l'élève fait l'expérience d'un modèle de participation régi par les règles de la Cité où chacun participe de droit à l'espace public, à condition d'accepter la mise à distance de ses caractéristiques singulières. L'élève anglais doit quant à lui gagner l'autorisation d'accéder à un espace public par le témoignage de son adhésion à des valeurs, d'où un plus grand droit de regard que s'arroge l'institution scolaire sur son intimité en contrepartie de la plus grande prise en compte de sa singularité et de ses identités multiples.

La définition institutionnelle de l'appartenance en France fera l'objet d'un double parallèle. En termes d'idéaux-types, la comparaison avec l'Angleterre fait ressortir la force des contrastes qui perdurent entre la référence à la Cité d'une part, au mérite et au modèle du bénévolat de l'autre. Le second parallèle consiste à confronter l'idéal-type aux pratiques. Or la logique institutionnelle s'articule difficilement à celle des acteurs, et entre en tension avec les pratiques pédagogiques, les aspirations des enseignants et l'expérience des jeunes. Le modèle d'égalité des chances fondé sur l'universalisme citoyen a perdu son monopole en tant que principe de justice (Derouet 1992), et les pratiques scolaires se sont assouplies par rapport au modèle scolaire républicain laïque reposant sur l'indifférence aux différences. Qu'il s'agisse de l'apparition d'éléments de discrimination positive dans les pratiques pédagogiques (Dubet 2001), de l'émergence de nouvelles éthiques enseignantes dans « l'école de la périphérie » (van Zanten 2001) ou chez les « nouveaux enseignants » (Rayou et van Zanten 2004), ou encore des formes de ségrégation ethnique (Payet 1995, Felouzis 2003), la recherche donne à voir une école bien moins hermétique aux différences, pour le meilleur et pour le pire, qu'elle ne le laisse à penser. Les formes institutionnelles de participation ont pour leur part moins évolué, et apparaissent de ce fait aujourd'hui régies par une norme impersonnelle en décalage avec les convictions et aspirations des acteurs éducatifs qui font une place accrue à l'exigence de prise en compte de la dimension affective ou des appartenances ethniques et culturelles des élèves.

L'exigence de mise à distance de tout ce qui fait de soi un être singulier qui perdure dans bien des pratiques institutionnelles de participation en France relève alors d'un double décalage. Décalage entre les pratiques et les idéaux d'une part, dans la mesure où les pratiques institutionnelles restent bien plus monolithiques que ne le sont les principes multiples de justice auxquels adhèrent les acteurs, comme si des pratiques institutionnelles héritées du passé avaient perduré tout en se vidant progressivement de leur sens. Décalage d'autre part entre les aspirations originelles d'une citoyenneté universaliste qui a conduit à établir une distinction stricte entre la personne de l'élève (en écho à la distinction rousseauiste entre l'individu régi par ses intérêts particuliers et le citoyen), et le vécu des élèves qui n'y voient pas une quelconque « libération » de leurs attaches communautaristes mais un manque de respect vis-à-vis de leur personne.

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