Dépasser l’intérêt et les limites de la comparaison internationale des performances : fabrication et circulation des « savoirs politiques »
CARVALHO LUÍS MIGUEL
Université de Lisbonne – Institut de l’éducation)
Dépasser l’intérêt et les limites de la comparaison internationale des performances : fabrication et circulation des « savoirs politiques »
Cet article aborde la comparaison internationale de performances à partir de l’enquête PISA. Nous verrons qu’il s’agit d’un outil de politique des savoirs qui, par des pratiques multiples (enquête, publication et organisation) avance des interprétations particulières en matière de « réalité éducative » et de « savoirs éducatifs pertinents » et des scénarii de politiques appropriées.
L’étude de la comparaison internationale de performances s’effectue à partir de deux idées complémentaires à l’heure où la gouvernance transnationale et les savoirs sur les « bonnes pratiques » sont appelés pour légitimer les politiques éducatives européennes et/ou nationales et la restructuration de l’état. Il s’agit de considérer ces outils comme des objets/processus destinés à assurer et renforcer la crédibilité et la contextualisation de ces politiques des savoirs. Ces outils servent par ailleurs à la fusion des éléments cognitifs et sociaux-organisationnels : quels sont les savoirs éducatifs qui comptent et comment le système éducatif devrait-il être gouverné ? Quels sont les mécanismes qui permettent l’engagement et la coopération des agences en éducation d’un pays à l’autre et assurent la pérennité des ressources (informatiques, financières et humaines) nécessaires à la fabrication de « monopoles de l’expertise » dans tel ou tel domaine de l’éducation ?
On s’intéressera d’abord aux débats passés et actuels sur l’intérêt et les limites de la comparaison internationale des performances. Nous verrons ensuite que les éléments clés de PISA (indicateurs de performance, suivi, collaboration à l’échelle mondiale) s’inscrivent dans la création de réseaux de politique des savoirs dans l’orbite d’une organisation internationale comme l’OCDE. Nous analyserons enfin les dimensions culturelles et organisationnelles de PISA afin de comprendre sa capacité actuelle à mettre en rapport des mondes sociaux différents (gouvernements, bureaucraties, personnel de l’OCDE, universités, instituts de recherche privés, experts, etc.) et à rassembler les savoirs et idées variés qui s’y développent.